J’ignore ce que je fais ici concrètement. Mes partenaires habituels pour les enfantillages ne foulent plus le sol du block après avoir été éliminés aux portes de cette finale et je ne vois plus aucun intérêt à grimper au centre de cette aire de jeu pour dévaler les toboggans en me brûlant les fesses. Règle numéro une pour profiter d’un tel endroit dans des conditions optimales : Ne jamais, ô grand jamais, porter des vêtements qui n’arrivent pas jusqu’aux pieds. La matière des différentes attractions adhère à la peau, effet ventouse garanti pour le meilleur mais surtout pour le pire avec les brûlures qui en découlent. Plutôt que d’en profiter une ultime fois, c’est allongé en boxer – mes vêtements abandonnés non loin de moi – que je profite de ce soleil. J’ai la flemme de bouger jusqu’à la piscine et j’apprécie cette solitude qui me permet de rêvasser en toute légèreté sans être interrompu toutes les cinq minutes. Mes yeux sont attirés par des bruits de pas qui viennent infirmer mon affirmation précédente. Impossible d’être seul plus de deux minutes ici, ce doit être une loi de l’attraction un peu étrange ou quelque chose dans le genre. Je reconnais cette montagne impressionnante de muscles qui approche. « Yo ! » Je lève une main pour pouvoir lui faire signe de l’index et du majeur sans pour autant m’intéresser plus que cela à sa présence. Il n’a plus grand-chose à m’offrir maintenant que nous avons couché ensemble… Une tension constamment abreuvée pendant sept semaines, tout cela pour… Ça. Si j’ai pris mon pied en le baisant comme il se devait, l’inverse ne se vérifie finalement pas tant que cela. Beaucoup de paroles pour un rapport qualité/prix pas vraiment à la hauteur de mes espérances. J’en attendais surement beaucoup trop de lui.

Je ne comprends pas ce qui a merdé la semaine dernière quand on sait ô combien la tension sexuelle était présente. J’irais même jusqu’à affirmer qu’elle était à son paroxysme lorsque mes lèvres se sont goulument attelées à lui faire perdre pied. La pêche n’était qu’un accessoire bonus pour le marquer d’une empreinte différente des autres. Les promesses étaient nombreuses, à la hauteur de cette excitation qui nous embrasait mais la rapidité a finalement pris le dessus sur tout le reste sans que nous puissions complètement en profiter. Chacun s’est occupé de baiser l’autre sans que l’intensité ne parvienne à nous mener autrement que mécaniquement à une jouissance plaisante, comme l’est toujours un orgasme masculin, sans pour autant se montrer transcendante. Je ne suis pas satisfait par ce que je lui ai offert, conscient d’avoir été parfait d’un bout à l’autre sur les préliminaires à en juger par ses soupirs et la décontraction complète de ses muscles, sur la préparation de son corps à la pénétration également… Je me suis même dépassé, jamais du genre à me montrer négligeant contrairement à lui qui m’a simplement invité à m’allonger pour prendre un coup. Le reste, néanmoins, n’était pas à la hauteur. Du sexe précipité, à la hâte d’un côté comme de l’autre qui me laisse finalement un goût d’amer et l’impression d’avoir trop longtemps fantasmé pour que l’impact souhaité soit à la hauteur du rendez-vous imaginé maintes et maintes fois. Le beau gosse s’installe sur le toboggan près de moi et le silence est plus gênant que jamais. « À toi aussi… Je n’avais aucun doute sur ta présence ici cette semaine. J’ai toujours cru en toi. » Cette ultime phrase sonne presque comme un reproche à l’encontre de ce mec qui ne pense qu’à sa gueule et qui ne m’accorde peut-être pas le respect nécessaire pour véritablement être heureux pour moi en dehors d’un désir de me féliciter pour la forme. « Quels sont tes plans ? J’veux dire… Pour terminer la semaine ? Il y a forcément des trucs que tu dois avoir envie de faire pour conclure ton aventure sans avoir le moindre regret au moment où le block nous fermera définitivement ses portes ! »

Dylan tire la tronche, mais ça n’a rien de nouveau. Je l’ai soigneusement évité depuis l’épisode de la plage, loin d’avoir pris mon pied comme j’étais pourtant en mesure de l’exiger avec un tel mec en face de moi. La libération devait être totale et pourtant… Rien de bien appréciable à se remémorer si ce n’est un début sympathique. Puisqu’il est là, autant essayer de discuter un petit peu même si je suis déjà très concentré sur ma bronzette. Le lieu pourrait paraitre étrangement choisi, mais c’est le seul endroit qui, de prime abord, était censé me garantir une certaine forme de solitude que je n’arrive pas à obtenir non plus puisqu’il est là, le cul posé sur le toboggan à tourner autour du pot. On sait tous les deux qu’il n’a pas spécialement été satisfait lui non plus, l’un ne va pas sans l’autre, la frustration est partagée. Logique, on parle tout de même de deux prétendus dieux du sexe, un tel manquement à notre réputation est difficile à assumer et à accepter. Le beau gosse bodybuildé s’emporte, s’agace de mon attitude et me pousse à légèrement me redresser, à prendre appui sur mes coudes pour pouvoir l’observer plus longuement après m’être débarrassé de mes lunettes de soleil. Je fronce les sourcils, le regard interrogateur face à une moue outrée comme la sienne. « Que voudrais-tu que je te dise d’autre ? » Nous y voilà, il aborde cette baise qui n’a clairement rien pour rester dans les annales – dans tous les sens du terme – mais monsieur me pointe du doigt sans jamais se remettre en question et me fait exploser de rire. « Ça t’arrive de te remettre en question aussi ? Tout est toujours de la faute des autres c’est ça ? Dois-je te rappeler qu’une baise digne de ce nom, ça se fait à deux ! Tu étais aussi peu enclin à me donner ce que je voulais que l’inverse à priori ! » J’étouffe un soupir résilié et me laisse retomber contre le sol synthétique de l’aire de jeux, mes lunettes de nouveau vissées aux yeux. « Je t’ai surement surestimé sous prétexte que t’avais un gros calibre entre les cuisses… Erreur de débutant. Les performances n’ont rien à voir avec la taille et tu en es la preuve vivante ! »

Je l’ai royalement ignoré tout le reste de la semaine après l’épisode de la plage afin de prendre le temps de faire le point sur cet échange, ma foi très particulier. Est-il possible d’autant rester sur sa faim ? De mémoire, ça n’a dû m’arriver qu’une fois de toutes mes expériences passives avec un mec qui était honteusement précoce. Un mauvais souvenir qui m’hérisse les poils rien que d’y penser. Le pauvre était tellement gêné, l’excitation était surement trop forte, je peux totalement le comprendre avec les préliminaires que je venais de lui offrir. Ce n’est pas le cas de Dylan, son endurance n’est pas à prouver mais quelque chose a manqué, cette étincelle qui était pourtant présente lorsque nous nous sommes lancés, complètement affamés l’un de l’autre et pas uniquement à cause de cette pêche utilisée pour nourrir des dessins très appétissants. « Que voulais-tu que je fasse ? Que je vienne te dire que notre baise était ma pire expérience depuis des années ? Je l’aurais bien fait hein, mais t’étais un peu trop occupé à sous-entendre qu’on était tous indignes de toi alors bon… Donner matière à me faire rabaisser davantage encore ce n’est pas mon genre ! » Il pense peut-être faire preuve de discrétion lorsqu’il s’exprime sur nous mais c’est loin d’être le cas. Je suis surement le moins concerné de mes camarades mais je sais malgré tout qu’il ne me considère pas et ne m’accorde pas le respect que je mérite. Je ne lui ai pourtant jamais rien fait de mal à l’exception de ce sexe très mal exécuté des deux côtés. La vie a ses raisons que la raison ignore. « Plait-il ? Comment ça c’est moi qui suis à l’origine de cet oubli ? T’es sérieux toi aussi ? Il ne me semble pas t’avoir mis le couteau sous la gorge ou même t’avoir empêché de faire preuve d’un peu plus d’entrain. Tu n’avais qu’à me renverser et j’aurais eu plaisir à te découvrir sauvage et plus dégourdi que tu ne l’as été d’un bout à l’autre mon petit ! » Je lorgne plutôt du côté dominant de la chose, par habitude, mais n’allez pas croire que je déteste être malmené et dominé. Il a manqué une opportunité de le faire, qu’il ne m’accuse pas de tous ses maux pour ne pas avoir à reconnaitre qu’il a merdé et pas qu’un peu. Je pouffe de rire et me laisse retomber contre le sol synthétique de l’aire de jeux, incapable de calmer ce rictus. « Si ça n’avait tenu qu’à moi… J’oubliais que t’étais menotté, bâillonnée, inconscient et paralysé pendant l’acte… On se croirait dans une espèce de réalité alternative, tu sais, le genre de trucs où t’es confronté à des banshees et où un lancer de dé à le pouvoir de te défoncer ta mère parce que t’as mauvais karma… » Je lui adresse un clin d’œil, déçu de me rappeler la présence de ces lunettes de soleil vissées sur mon nez et qui l’empêchent donc de capter ces jeux de regard qui ont pourtant toute leur place dans notre conversation. « Je ne t’ai pas seulement gobé la bite du regard, si mes souvenirs sont bons ! Il me semble même que tu as adoré la profondeur de ma gorge mais j’dis ça… J’dis rien hein ! » Je souffle, pris dans un élan de provocation qui me donne envie de verser de l’huile sur le feu plus qu’autre chose à présent. Je l’écoute, encore et encore, il compose sur cette éternelle rengaine, toujours dans la même tonalité. « Si ce n’était que de moi… Mais tu t’entends un petit peu quand tu parles ? Ton problème c’est que tu roules des mécaniques à longueur de journées sans rien faire concrètement. T’attends quoi ? Que je me lève et que je te saute dessus encore une fois ? Tu veux te prouver des choses, ME prouver des choses ? J’suis allongé en caleçon devant toi gars !!! » Un soupir théâtrale et le regard à nouveau rivé sur le ciel, nettement plus intéressant que lui. Tu ne vaux pas mieux que les autres. Mes lippes s’étirent à nouveau en un très large sourire. « Si tu le dis ! » La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe.

Il est immédiatement sur la défensive lorsque j’attaque indirectement ses performances sexuelles en lui expliquant que cette expérience censée être comparable à une rencontre au sommet figure parmi mes plus grandes déceptions depuis des années au bas mot. Il s’empresse de surenchérir comme pour essayer d’avoir le dernier mot d’une conversation sur laquelle nous tombons pourtant tous les deux d’accord, pas de quoi débattre pendant des heures et des heures. Je lève les yeux au ciel, finalement bien content d’être protégé par mes lunettes de soleil qui l’empêchent d’avoir accès à certaines de mes réactions exaspérées par son attitude. « Je l’espère très sincèrement pour toi, et pour @Eli, @Frida et @Hayden aussi ! » S’il avait considéré ce que nous avons partagé comme un excellent moment, il y aurait eu de quoi se poser des questions sur les performances des camarades cités précédemment et je suis quasiment certain qu’@Hayden est un chaud lapin à notre hauteur et donc potentiellement un très bon coup. Peut-être aurais-je dû attendre un petit peu avant de le repousser, pour pouvoir m’assurer d’une telle hypothèse. Maudit acte manqué ! « La transaction ? » Je répète, outré de l’entendre me considérer comme un objet ou quelque chose qu’on peut échanger dès que l’envie se présente. « Je sais bien que tu m’accordes très peu de considération, mais j’pensais pas qu’en plus te me percevais comme un accessoire dispensable. Elle est peut-être là, la différence entre toi et moi. Je ne baise qu’avec des gens pour qui j’ai du respect et de la considération. J’me demande parfois comment je fais pour trouver cela chez toi ! » Parce qu’il est un pote ici, pas un ami puisque je ne le connais pas assez, mais un coéquipier qui a marqué mon aventure chez les roses et avec qui j’ai finalement trouvé un moyen de cohabiter en partageant de très bons moments. « Mais je ne joue pas la victime, Dylan. Je sais reconnaitre mes torts contrairement à toi. T’as vraiment du mal à reconnaitre que toi aussi tu as merdé. C’est dingue et tellement peu sexy… Un vrai tue l’amour. » Je grimace, pas du genre à me victimiser pour si peu. Nous n’avons pas su percevoir ce que désirait l’autre pour prendre son pied au lit, ce sont des choses qui arrivent. Il me provoque en insinuant que je suis presque nul sur toute la ligne et que seule ma pipe était finalement à la hauteur de ses espérances. J’ai mis le paquet à ce niveau-là, rarement il a dû se faire dévorer comme je l’ai fait… La faute à ce fantasme qu’il a représenté tout au long du jeu malgré tout le dégoût que ses actions pouvaient parfois m’inspirer, notamment vis-à-vis de mon meilleur pote. J’ai tenu un moment avant de m’abandonner à cette idée malgré tout.