Accroupi devant la cheminée, Clay a délaissé les ustensiles et s’amuse à souffler lui-même contre le foyer du feu, par-dessous les buches qu’il a entassées. — Le tout c’est de le nourrir beaucoup au début, et sa main attrape une nouvelle poignée de brindilles qu’il dépose par-dessus le tout. Les flammes gobent tout et font grandir l’âtre, la chaleur se répand tout autour d’eux, et atteint @Shadi, assis sur l’un des canaps moelleux. Chacun a sa tasse de chocolat chaud brûlante devant lui, déposée sur la table, et Clay s’affale dans son propre canap en face de Shadi, un sourire content sur les lèvres.  — Trop bon de se retrouver là au milieu des montagnes, t’en dis quoi ? Il observe le garçon, curieux de connaitre son avis. — T’as vu le lac ? Shadi n’aime pas l’eau, mais Clay peut vanter sa fierté d’être parvenu à l’emmener faire un tour en bateau, il y a quelques semaines. Il l’avait même comparé à Luffy, le roi des pirates qui sait pas nager. Il fait tourner son chocolat entre ses mains, réchauffant les extrémités de son corps au contact de la tasse. — Est-ce qu’il y a des combinaisons que vous n’avez jamais expérimentées, Maggie et toi ? Il demande soudain, son esprit tourné vers le secret de Shadi, révélé la semaine dernière. Il était certain d’un lien de ce type avec Maggie, mais lui et sa team n’avaient pas été suffisamment rapides. — Est-ce qu’elle a déjà été ta mère ?

Je laissais mon regard courir sur les meubles. Vous le faites vous des fois ? Imaginez un bonhomme miniature parcourir les fournitures, exécuter des sauts périlleux entre deux crevasses et rebondir parfois sur les surfaces pour monter d'un étage ? Moi ça m'arrivait souvent. Je trouvais que c'était une bonne manière de passer le temps. Dans une autre vie, j'aurais aimé faire du parkour, mais mon âme n'avait jamais été assez courageuse pour se laisser tenter par l'expérience. « T'es sérieusement entrain de m'expliquer comment fonctionne le feu ? » que je lâchais, un peu malin. Parce que j'étais quand même le maitre de la flamme par ici, du moins c'était comme ça que les résidents me voyaient, associant le satanisme à une brûlure sur ma peau qui ne s'effacerait jamais vraiment. J'avais toujours aimé jouer avec le feu, peut-être parce que justement, ça comblait mon manque de courage et me donnait l'impression d'être invincible, alors que je ne l'avais jamais été. Mon pull bonhomme de neige sur les épaules, je recroquevillais mes jambes contre mon torse, position habituelle lorsque je souhaitais être confortable. Et puis ça faisait bouclier aussi. « C'est la première fois que je voyais de la neige de mes proches yeux. » ça pouvait paraitre assez triste, mais ça ne l'était pas, parce que l'on ne pouvait pas réellement manquer quelque chose que l'on avait jamais connu. « Je pensais qu'il ferait plus froid que ça. » mais ça, c'était juste les flammes parcourant mon sang qui parlaient. Parce que j'étais pas du genre à être particulièrement frileux. « Euuuh non pas encore, mais Loen arrête pas de me bassiner pour y aller. » la vérité, c'était que la semaine dernière, j'avais failli me noyer lorsque Samm m'avait amené au lac, et je n'avais pas vraiment envie de revivre cette expérience. Si je le lui disais à @Clay, il se moquerait probablement de moi. « Y'a des choses qui te font peur, à toi ? » il avait l'air tellement intouchable, tellement fort. Évidemment, tout le monde avait une faiblesse, mais dans ma tête, Clay c'était un peu cette carrure inébranlable capable de surmonter n'importe quoi. L'américain me questionnait sur nos liens passés avec @Maggie et je penchais légèrement la tête, pensif « Je crois qu'on a jamais été en opposition. » ennemis par exemple « Ou alors dans nos premières vies, peut-être... je me souviens pas de toutes. Et puis certaines ont été plus éphémères que d'autres. » oui, on pouvait vivre des décennies comme quelques années. « Oui, plusieurs fois. Et j'ai été la sienne. Une âme n'a pas de sexe. J'ai été sa soeur de sang aussi. » l'expérience avait été assez étrange lors de la régression, mais étrangement, lorsque j'avais retrouvé un corps féminin passé, je n'avais pas eu l'impression d'être à la mauvaise place. Parce que je l'avais déjà vécu, quelque part. « Y'a une personne toi, que t'es certain que t'as déjà vu dans d'autres vies ? » une personne qui était importante à ses yeux.

Sans comprendre du premier coup, il relève la tête vers @Shadi, la mine perplexe. Puis la lumière se fait, à tous les étages. — Aaaah, merde, oui, excuse Satan. Mais toi, tu apportes les ténèbres, il signale dans un sourire malin. — Le Porteur de Lumière, le Buisson Ardent, c’est pas toi mon pote. Ou alors, faudrait savoir. Il le regarde un moment, lové contre lui-même dans son petit pull de laine mignon. — T’aimes ça, le feu ? Ça semble bien être le cas, certaines personnes aiment s’endormir ou méditer au bruit des flammes léchant les bûches, d’autres en ont peur, parce que ça symbolise à leurs yeux autre chose que le calme et l’apaisement : l’enfer, les incendies, la douleur des brûlures… Clay fait partie de ceux qui y voient une sublime source de lumière, une chaleur bienvenue dans le froid, quel qu’il soit. C’est sa première fois, à @Shadi, première fois qu’il plonge les pieds et les mains dans la glace, qu’il la voit recouvrir la terre et l’eau de gel et les cimes des arbres. — C’est vrai qu’il fait doux, à Frisco. La neige n’y est pas impossible, de même que le gel, mais on peut pas dire que ce soit attendu. Il sourit à l’entente de l’escapade prévue entre Loen et Shadi sur le lac Louise. Ça lui plait, l’idée que les deux garçons soient réunis, et d’imaginer que Shadi est plus tranquille par rapport aux relations de Maggie, quelles qu’elles soient. — Emmène des brassards, j’suis pas certain que Loen soit en mesure de plonger à ton secours au besoin, il se moque dans son sourire, les petits bras de Loen lui apparaissant, versus le corps épais et musculeux de Shadi. Il lui pose une question d’enfant, comme s’il était un petit garçon face à un adulte particulièrement puissant. — Ouais, des tas, il assure, essayant de faire le nombre dans son esprit pour en citer des exemples à Shadi. — Avant un combat, j’ai toujours eu peur. Cette peur de ouf, tu sais, qui te prend au ventre et t’enserre jusqu’à ce que t’aies envie de la gerber. Je pouvais pas parler, je tournais en rond dans les vestiaires à devenir dingue, jusqu’à ce qu’on me dise « c’est bon, tu peux y aller », et là j’entrais sous les lumières, sur le ring, et la peur s’envolait dès l’instant où je croisais le regard du mec en face. Y’a rien de pire que l’appréhension. Quand j’étais petit, j’avais peur qu’un mec soit caché dans ma chambre pour me buter, la nuit, au moment de m’endormir. Bon, souvent c’était mon reuf qui se cachait sous le lit ou dans mon placard et qui surgissait pour me frapper, mais bref, quand c’était pas mon frère, j’avais peur que ce soit quelqu’un d’autre que j’connais pas. J’avais pas peur de devoir le combattre, tu vois, j’avais peur qu’il m’attaque dès que j’aurais les yeux fermés. Ne pas voir, ne pas savoir… C’est ça qui me fait peur. L’idée d’être surpris sans s’y attendre, sans y avoir été préparé. Parce que sans préparation, il avait toujours perdu. Un combat, ça se gagne à la préparation, c’est tout. — Toi c’est différent, non ? T’as peur de pas pouvoir faire face ? Par exemple, le lac. S’il tombait, et s’il ne parvenait pas à nager pour rester au-dessus de l’eau, et s’il coulait ? Les paroles de Shadi quant à ses vies mêlées à celles de Maggie le fascinent et il l’écoute tandis qu’il est toujours assis à même le sol, devant le feu ronflant, bercé par ses histoires. — Et même là, mère et fille, fils et père, sœurs de sang, il y a toujours eu de l’entente entre vous, dit-il comme pour lui-même, songeur. C’était réellement beau. Il lui pose une colle, Shadi. Avec qui aurait-il pu avoir été lié dans une ou d’autres vies ? Pas sa mère… Sinon, elle ne lui apparaitrait pas autant comme une étrangère. Aurait-il pu être un frère de son père, avec lequel il aurait entretenu une relation dure, violente, conflictuelle bien qu’aimante ? Il n’en sait rien, et parce qu’il ne trouve pas de réponse, il fronce les sourcils et pose sur Shadi une mine très sérieuse qui cache son envie de rire. — J’ai été le daddy d’@Olivia. Sûr.