Je me balade, ma progression d’un point A vers un point B salement perturbée par des mouvements de danse incessants inspirés par la musique qui défile dans mes oreilles et me donne l’impression de donner une véritable performance au milieu d’une foule en délire. J’en viendrais presque à regretter d’avoir des écouteurs, justement, parce qu’il est impossible pour mes camarades de profiter de la musique. Il n’y a que ma voix et des notes qui, à n’en pas douter, sont relativement approximatives. Je donne pourtant de ma personne, j’irais même jusqu’à dire que je donne tout sur cette chanson de Céline Dion, à croire que la diva qui sommeillait en moi s’est enfin éveillée. À deux doigts d’un climax synonyme de puissance vocale – et de massacre au point où l’orage pourrait s’abattre en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire – mon regard est attiré vers un corps occupé à flotter. Il me faut plusieurs secondes, peut-être un peu moins pour réaliser que je viens de passer devant une piscine avec une personne potentiellement inanimée. Une demi-seconde supplémentaire pour me lancer à la recherche de réponses, me retourner et bondir sans réfléchir en direction de ce bassin. Je dépose mon téléphone près du bord, balance mes écouteurs en un mouvement fébrile et plonge tout habillé dans cette piscine pour attraper la jeune femme qui flotte. J’ai le cœur qui bat à mille à l’heure, la panique qui monte, forcément. « @Alix où que tu sois… AU SECOURS ! Je ne sais faire que du bouche à bouche moi ! » J’attrape les épaules de la jeune femme et hurle, surpris, lorsqu’elle se redresse d’un coup d’un seul sans prévenir, visiblement aussi apeurée que moi. « Seigneur, Jésus, Marie, Joseph… TU VEUX ME FAIRE MOURIR OU QUOI ! » Je l’éclabousse, à mi-chemin entre l’hilarité et la consternation, bientôt interrompu lorsque je réalise qui se trouve en face de moi. « J’ai cru que tu t’étais noyée ! » Je reste calme, prêt à marcher sur des œufs si cela est nécessaire. J’ignore à quelle sauce je m’apprête à être mangé.

Rien de tel qu'un bon bain dans la piscine sous la chaleur du soleil martiniquais. Cet endroit était incroyable, bien plus sympa que le block de la première saison. Qui n'était pas si horrible, mais vous n'aviez pas des extérieurs aussi sympa qu'ici. La piscine était carrément magnifique, et tu t'y reposais sans faire attention à ce qu'il y avait autour. Allongée dans l'eau, te laissant porter, tu faisais le vide, sans entendre quoi que ce soit qui se passait autour de toi. Pas même @apollon, qui arrive de nulle par en te secouant par les épaules. « AAAAAAAAH ! NON MAIS CA VA PAS BIEN OU QUOI ?! » dis-tu en te redressant avant de trouver un équilibre, surprise. Tu mets quelques secondes avant de reconnaître le brun. Evidemment, ça ne pouvait être que lui. « Mais et toi ?! Tu crois que tu fais quoi là ? Je peux pas nager tranquille ? » Tu étais totalement tentée de lui dire que l'idée de le faire mourir t'avait probablement traversé l'esprit, mais tu te retenais. Tu nages un peu pour t'éloigner de lui. « C'est très gentil mais je sais nager, merci. » réponds-tu un peu sèche. Et puis s'installe ce silence un peu awkward, mais d'un autre côté, tu ne sais pas vraiment quoi lui dire. Tu essayes de te calmer un peu. « Tu sais que j'ai rien de spécifique contre toi, non ? » demandes-tu comme ça, ne sachant pas vraiment ce qu'était votre relation aujourd'hui. C'était contre Goliath que tu étais énervée, pas contre lui. Ton problème avec @apollon, c'était plus de savoir s'il comptait de nouveau jouer avec Milo comme il l'avait fait ou non.

Mon sang ne fait qu’un tour lorsque j’aperçois au loin ce corps qui flotte dans la piscine. Dans une telle situation, c’est l’instinct qui est forcément amené à prendre le dessus et à s’exprimer dans tout l’extrémisme qu’un scénario catastrophe induit. On se demande souvent comment on réagirait face à une situation périlleuse, je crois en avoir la réponse. Je ne prendrais pas la fuite, ne resterais pas non plus cloué au sol, paralysé par l’angoisse, le choc et la surprise. Non, je foncerais tête baissée, comme toujours, sans réfléchir davantage. Mon dernier stage de secourisme remonte à plusieurs années à présent, je me suis toujours promis de recommencer, d’aller plus loin et de creuser ce domaine mais le temps m’a manqué – comme souvent – et j’ai décidé de remettre cela à plus tard, encore et encore. Au moment de plonger dans ce bassin, je ne pense à rien, je ne parviens même pas à me concentrer, à penser comme il serait d’usage de le faire. Ma seule priorité, c’est de sortir le corps de l’eau au plus vite avant d’envisager la suite comme d’habitude, dans l’urgence. Je saute, trempé de la tête aux pieds, mes vêtements désagréablement collés à ma peau et j’hurle à qui pourra m’entendre et venir me prêter main forte. À qui aura la capacité de prendre en charge cette victime, un relais nécessaire. J’ai le cœur qui bat tellement fort que je n’entends que lui jusque dans mon crâne, la sensation est horrible et contribue à faire grimper davantage encore la panique qui menace de me gagner. Je m’accroche, tire le corps vers l’arrière et étouffe un cri d’effroi lorsqu’une voix s’élève, à priori aussi surprise que moi. Elle m’engueule et je ne manque pas de surenchérir sur le même ton, sous le coup de l’émotion. « On nage en battant des mains ou des pieds… On ne nage pas en flottant comme ça ! J’ai cru que tu étais morte, putain ! » J’ai les mains qui tremblent, les larmes qui menacent de déborder à chaque instant. Elle se dérobe, s’éloigne et fait preuve d’une sécheresse qui me glace le sang. « Désolé… Je ne pensais pas à mal ! » Une évidence, mais avec elle rien n’est certain. Je préfère donc le repréciser, l’expliciter même. Ses mots me font sourire, moqueur malgré moi. « Ah bon, tu n’as rien contre moi ? Tu devrais le dire à ta voix, si nous n’étions pas au beau milieu de la Martinique sous un soleil de plomb, une nouvelle ère glaciaire débuterait rien qu’en t’écoutant parler. »

Tu ne comprends rien à ce qu'il t'arrive. Tu es là, tranquillement à la piscine. Tu te détends autant que tu peux, tu en as vraiment besoin. Tu laisses l'eau porter ton corps, sans ne faire aucun effort physique. Tu te reposes, le temps d'un instant, mais tu n'as pas vraiment le temps d'y penser puisque tu viens te faire secouer, tu ne sais pas trop par qui, te sortant de cet instant apaisant. Il te faut un moment avant de te rendre compte qu'il s'agissait d'@apollon, évidemment. « Tu vas m'apprendre à nager maintenant ? Laisse moi mourir la prochaine fois, ne te gêne pas ! » lui lâches-tu abruptement, sur le coup de la colère et de la surprise alors que tu essayes de reprendre tes esprits. Mais tu vois bien qu'il n'est pas bien, alors tu essayes de te calmer un peu, repensant à ce que Milo t'avait dit. Pas de prise de tête. « Oui, oui. J'ai bien compris. Désolée de t'avoir fait peur. » tu dis, toujours un peu froide, en te passant une main dans les cheveux pour les remettre un petit peu en ordre. Apollon faisait parti de ces personnes que tu avais essayé d'oublier après votre saison, parce que tu n'avais pas vraiment envie de garder contact avec lui, et surtout parce que vous étiez un peu trop lié à ton goût par Goliath. Tu lui dis que tu n'as rien contre lui directement, tu es énervée contre Goliath, mais c'est tout. Sa réponse t'exaspère un peu, mais tu prends sur toi. « Une répartie toujours autant au point à ce que je vois. » réponds-tu simplement, avant d'ajouter. « Tu t'attendais quand même pas que je t'accueille en te sautant dans les bras, si ? » Il pouvait être un peu idéaliste, mais honnêtement, il était quand même à l'origine de tous les dramas de la saison une dans lesquels tu avais pu être impliquée malgré toi, ou presque. « Penses ce que tu veux, je m'amuserai pas à te le dire si je ne le pensais pas. » finis-tu par lui dire, avant de repartir nager.

Je n’écoute que mon courage, me charge de balayer la peur d’un revers radical de la main pour me concentrer sur la seule chose qui importe à cet instant : sauver la vie d’une personne en danger de mort. Je ne réfléchis pas outre mesure, conscient de la différence que peuvent avoir quelques précieuses secondes sur les séquelles d’une personne sauvée après un long massage cardiaque. Le cerveau ne doit surtout pas être privé d’oxygène trop longtemps. Mes connaissances, parfois tirées des nombreuses séries médicales que je dévore, surgissent comme des flashs assourdissants sans pour autant m’empêcher de plonger pour lui venir en aide. Une immense frayeur, aussi bien pour Gemma que pour moi, qui se termine plutôt bien finalement dans le sens où ses jours ne sont pas le moins du monde en danger. Je me suis laissé avoir, victime des apparences, mais je ne risque pas de m’en plaindre. Je suis soulagé. Sous le coup de l’émotion, mais sincèrement rassuré. Je réagis, pris sur le vif, et encaisse chaque remarque glaciale qu’elle prononce à mon égard. Elle n’a pas changé, comme si les ultimes mots échangés quelques mois en arrière ne dataient que de quelques heures à peine. « Je ne te laisserais jamais mourir, t’es folle ! » Je m’indigne, non sans lui asperger le visage avec un peu d’eau, comme pour lui rafraichir les idées. Folle, elle doit l’être, n’est-ce pas ? Je ne vois que cela pour justifier une telle réponse. Je ne laisserais même pas le pire de mes ennemis en mauvaise posture. J’ai un cœur beaucoup trop grand pour cela, une sensibilité exacerbée qui m’empêche de voir le mal, de me concentrer sur le noir plutôt que de chercher la lumière dans toutes les situations, aussi désespérées puissent-elles être parfois. Froide, glacée, gelée… Je suis très rapidement confronté à mes propres faiblesses lexicales dès lors qu’il est question de qualifier son attitude vis-à-vis de moi. Je ne peux même pas lui en vouloir, elle est libre d’agir comme elle le souhaite après tout. Je l’accepte sans chercher à forcer le destin. « Je ne m’attendais à rien. Mais je n’arrive pas à m’empêcher de me questionner sur tes motivations concernant cette aventure. À quoi bon participer si c’est pour rouvrir des blessures ? » Il s’agit bien de cela, d’une blessure qui n’est pas du tout cicatrisée. « Loin de moi l’idée de retourner le couteau dans la plaie, mais je ne m’excuserais pas pour mon bonheur, pour que les choses soient claires ! »

Evidemment que c'était @apollon qui venait te "sauver". Vraiment, il avait clairement le rôle du preux chevalier, déjà dans votre saison, mais là encore. Ca t'énerve, mais tu restes calmes, inutile de t'énerver de toute façon. Tu roules des yeux cependant quand il prend ta remarque totalement au premier degrés. « Apollon, c'est une expression. La prochaine fois, laisse moi nager tranquille, si tu préfères ! » Bien sûr que tu ne lui demandais pas de te laisser mourir, c'était juste une phrase sortie comme ça, même si tu pouvais comprendre son interprétation. Tu lui dis assez simplement que toi, tu n'as rien contre lui, mais sans doute qu'il n'a pas dû l'entendre vu ce qu'il te dit. « T'es sérieux Apollon ? Je viens de te dire que y avait pas de problème entre toi et moi et tu me balances ça ? » Oui bien sûr, loin de lui l'idée de retourner le couteau dans la plaie, mais tiens Gemma, prends bien dans la figure le bonheur que tu aurais pu avoir à ma place. Tu nages jusqu'à la sortie de la piscine, pour en sortir. « Tu vas rester dedans ? T'es tout habillé. » lui demandes-tu, l'invitant à sortir en lui tendant un drap de bain, , t'asseyant sur l'un des transats. « Petit un, il n'y a absolument aucune blessure d'ouverte ou je ne sais pas quoi. Tout ce qui a pu se passer dans notre première aventure, c'est bien derrière moi, ne t'en fais pas pour ça. » Enfin franchement, tu donnais pas non plus l'air de souffrir là, non ? Il t'avait littéralement sauté dessus alors que tu ne t'y attendais pas, il allait quand même pas te juger par rapport à cette réaction là. « Petit deux. Si tu es heureux, et qu'il est heureux, franchement tant mieux pour vous et c'est tout ce que je peux vous souhaiter à tous les deux. Ca ne me regarde, absolument pas, et Goliath savait que je n'aurais envie ni de lui parler, ni de le voir, puisque c'est précisément ce que je lui ai dit la dernière fois qu'on a parlé, il y a plusieurs mois de ça. Donc peut être qu'il ne te l'a pas dit, auquel cas, c'est une histoire entre vous, mais lui savait très bien à quoi s'attendre. » C'est vrai qu'entre temps, ce sentiment que Goliath t'avait vraiment roulé en fait, et s'était bien moqué de toi, c'était alourdi avec les images que tu avais vu, mais ça, c'était bien trop personnel pour le partager avec lui. « Et petit trois, t'inquiète pas, ça le regarde lui et ça me regarde moi. On est des adultes, si on a besoin de se dire les choses, on se les dira, ça n'a pas besoin de passer par toi. » Enfin, toi, tu dirais à Goliath ce que tu avais à lui dire. Lui, c'était moins sûr, mais c'était là encore un autre sujet. « Tu viens de me prendre par surprise, de me faire flipper comme je sais pas quoi. Donc excuse moi de ne pas être ultra chaleureuse, mais non, j'ai rien contre toi, c'est sincère. C'est bon ? »

Je m’attendais à une telle animosité, à cette fraicheur de sa part. Serais-je véritablement en droit d’exiger une autre attitude ? Je ne crois pas, il serait poussif de lui demander des explications quand on sait les histoires que nous avons en commun elle et moi. Je ne le dirais surement jamais à voix haute, pas du genre à m’épancher plus que de raison sur le passé, encore plus sur mes regrets, mais cette jeune femme est mon plus gros regret de la saison. J’aurais aimé que les choses soient différentes entre nous, qu’elle ne se sente pas cantonnée au rôle du dindon de la farce après un triangle amoureux qui nous aura tous les trois laissé sur les genoux. @Goliath était perdu, j’ai ma part de responsabilité là-dedans. Je n’aurais jamais pu anticiper sur les événements qui se sont imbriqués après une simple comparaison, l’usage d’un terme que je pensais anodin. Un date sous les étoiles pour justifier notre présence en plein milieu de la soirée à l’extérieur du block. Ce soir-là, si vous m’aviez dit qu’il se passerait quelque chose entre lui et moi je vous aurais surement explosé de rire à la figure. Je ne m’attendais pas à ce qu’il m’embrasse, ne m’était pas préparé à l’ouragan qui s’en est suivi. Le cœur a ses raisons que la raison ignore. J’ai tenté de prendre du recul, de lui laisser le champ libre parce que j’estimais cette décision sérieuse, nécessaire pour son bonheur à lui. Je suis responsable d’un retour de flamme que je n’ai pas su contrôler, que je n’aurais laissé étouffer pour rien au monde, encore plus maintenant que je nous vois lui et moi, heureux ensemble depuis le mois d’août. Trois mois, ce n’est peut-être pas grand-chose, mais après tous les obstacles que nous avons dû contourner, c’est une victoire qu’il est important de mettre en exergue. « Si je n’avais pas pensé à tort que tu étais en train de te noyer, je n’aurais pas plongé à l’eau complètement habillé ! » Je me serais contenté de poursuivre mon chemin sans m’arrêter ici. Elle s’emporte encore, préfère sortir de l’eau alors qu’elle était occupée à en profiter. Elle semble très vive, à fleur de peau pourrais-je même dire, qu’elle soit prête à l’admettre ou non. « Oh que non… C’est désagréable de se baigner avec ses vêtements… Ça colle de tous les côtés ! » Je grimace, théâtral, en essayant de repousser mon t-shirt qui a l’air d’une seconde peau ainsi trempé. J’accepte la serviette qu’elle me tend d’un sourire poli. « Merci beaucoup ! » Je n’avais rien prévu pour me sécher, puisque je ne m’attendais pas à sauter à la flotte de la sore. Elle reprend la parole, Gemma, et je prends soin de l’écouter très attentivement, d’uniquement acquiescer à ses propos pour ne surtout pas l’interrompre. « C’est bon. » Je confirme, en un fin sourire. Un léger silence s’installe et j’en profite pour remarquer, sur un ton un peu plus espiègle. « Tu rigoleras en repensant à cette scène dans quelques jours… Ça ferait un carton dans la rubrique prank de TikTok. »