Le feu qui danse dans ses yeux, reflétant les quelques chandelles qu’elle a réussi à trouver pour se mettre dans l’ambiance, Remi s’approprie l’espace qui l’entoure. Elle laisse le silence l'apaiser. Il y a évidemment quelqu’un pour l'interrompre, ce qui doit inévitablement être attendu lorsqu’on partage son quotidien avec mille et un candidats. Et caméras. Elle accueille @Virgil sans interrogation, dans la simplicité de deux inconnus qui vivent un épisode d’insomnie. Pour Remi, la nuit est le moment où elle se sent vivre. Où elle s’énergise. Le candidat de son côté ne perçoit peut-être pas la scène qui m’amène vers eux de la même façon. Elle ne peut pas lui en vouloir. Ses mains occupées à brasser ses cartes, ses précieuses. Smith-Waite qui l’accompagne dans les chemins sinueux de la vie. - Les cartes t’ont attirées jusqu’ici, finit-elle par souffler dans un murmure sucré avant d'ancrer son regard dans celui de son interlocuteur. - La force gravitationnelle qui nous guide à vouloir saisir nos désirs et notre avenir est souvent bien plus forte qu’on le croit. Mais elle n’était pas certaine qu’il était capable d’y croire, d’aussi peu que la sorcière avait pu observer de Virgil. - Ou t’es ici pour le vin. Ce qui est aussi une bonne réponse. Après tout, pourquoi venir jusqu’ici si ce n’est que pour s’abreuver du nectar d’un certain péché. - Tu veux en piger une? Carte. De tarot. Elle indique en glissant son regard sur son jeu qu’elle prend soin d’étendre sur la table devant lui. - Il n’y a jamais de mauvaise réponse avec le tarot. Que des possibilités.

réussir à s’assoupir quarante minutes en deux jours et rêver que salva kiir le course en brandissant son chapeau dans lequel se trouve un trou noir en rotation capable de distordre le temps et l’espace n’est pas une vie. il doit se rendre à l’évidence : il a besoin d’un truc que ni café, ni weed ni whisky ne procure. le rôle du lsd sur les ptsd militaires est encore en cours de discussion, mais naïm et lui ont décidé depuis longtemps de se transformer en cobayes volontaires. et parce qu’il serait compliqué d’expliquer aux copains que si ses pupilles remplissent tout l’espace des iris, d’un seul coup, c’est parce qu’il se transforme en chat tous les minuits, il décide d’embarquer le buvard dans sa poche direction les souterrains, la cour des miracles seule capable de le tirer de cet enfer. son cœur frôle l’arrêt quand, en entrant dans la cave à forte odeur de futs de chêne, il tombe nez à nez avec quelqu’un dont le visage impassible est éclairé par les flammes de quatre chandelles façon jugement dernier d’un hack n’ slash. est-ce qu’il aurait pris le buvard en dormant sans s’en rendre compte, poussé par le besoin et la panique, auquel cas cette blonde à moitié enflammée ne serait qu’une nouvelle hallucination de plus au sein d’une réalité calquée sur diablo iv ? elle s’appelle pas lilith mais remi, @remi dont pessa lui a déjà parlé, celle qui affirme être une sorcière. très tenté de gober le buvard avant de se prêter à l’expérience, il n’en fait rien cependant : si en effet le destin l’a porté jusqu’ici, c’est peut-être qu’une session tarot vaut mieux qu’une dose d’ecsta. elle parle pas, elle murmure comme le prof trelawney, et l’idée de la force gravitationnelle lui évoque dans une grimace le chapeau trou noir du salva kiir de son cauchemar. calmos avec la gravité. il fait semblant d’acquiescer à l’option « venu pour le pinard », à défaut de pouvoir répondre autre chose, et s’approche des cartes qui dansent entre les doigts blonds. — ok. on cherche des signes, alors ? dit-il à voix basse à son tour tout en admirant du regard le dos d’une des cartes sur laquelle elle a encore l’index.

Il y a une simplicité à détecter lorsque ce genre de moment se présente. Remi suit toujours toutes les étapes pour vivre l’instant présent. C'est-à-dire, aucune. Puisque l’impulsivité peut s’avérer être une meilleure amie. Les cartes qui dansent dans ses mains, elle n’a jamais eu l’intention de ne pas accueillir @virgil dans son rituel qu’elle mettait en place. Il n’y avait pas un dicton qui disait qu’à un c’est bien, mais deux c’est mieux? Peu importe. Elle n’allait certainement pas le forcer à rester, mais s’il était ouvert à l’expérience, les cartes et son interlocutrice étaient prêtes à l’accompagner dans cette lecture des arcanes. - On cherche toujours des signes. Ils sont partout. Il n’en tient qu’à nous de les interpréter ou non. y croire ou pas. - Mon approche avec le tarot n’est pas uniquement comme un outil de divination. Je vois plutôt dans cet art une façon d’éclairer le présent et de s’aider à poser et répondre aux questions qui nous correspondent. Elle étale de façon experte les cartes contre la table, laissant quelques secondes pour profiter du silence et tenter de saisir les faibles expressions de celui-ci qui lui fait face. Sans être sur ses gardes, elle anticipait qu’il puisse se mettre à rire ou simplement s’amuser de la situation, réaction auquelle elle avait l’habitude avec le temps. Elle profite du moment de flottaison pour verser une coupe de rouge à Virgil, se disant que c’était la moindre des choses. - Ok. Quand tu veux. elle souffle de sa voix non pas mystérieuse, mais plutôt invitante. - On y va d’un tirage simple. Une seule carte pour briser la glace. elle ajoute, sa propre main gravitant au-dessus de celle du candidat, sous une forme de guide énergétique. Puis le choix tombe. L’image se dévoile et accroche instantanément un sourire aux lèvres rosées de la sorcière. - Le fou. l’unique, le seul. - Intéressant. Ajoute-elle en venant caresser la carte du bout de son index avant de relever les prunelles en direction de celui auquel elle associera cette carte jusqu’à la fin du jeu. - Celui qui n’a pas de destination ne peut jamais se perdre.

carte du fou

les signes sont partout, quand on les cherche. il y a partout les signes que l’on cherche. ça se tient, il acquiesce en l’écoutant comme un élève de maternelle écoute sa maitresse, notamment parce que ses cheveux au blond presque blanc et ses yeux agrandis par la lueur des flammes le fascinent un peu. — "pas uniquement", donc quand même un peu ? elle voit les futurs, @remi, ou seulement les voies qui s’ouvrent à nous et qu’on choisit d’emprunter ou pas ? — une sorte de psychanalyse ? ouais parce que bon, dit comme ça, le coup de se poser les bonnes questions pour éclairer le présent, ça sonne plus lacan que trelawney et des deux, il sait pas trop lequel il préfère, probablement aucun. pensif sur les grandes questions complexes qu’elle a ouvertes en trois phrases, il attrape distraitement la coupe de vin qu’elle lui tend, son buvard désormais gommé de son esprit. une seule carte pour briser la glace, et ça semble fonctionner parce que remi sourit devant le fou qui l'ignore sur le carton. il attend une explication, impatient de croiser à nouveau son regard, ses pensées parties flotter du côté des souvenirs que la sorcière lui inspire. le camp de gnani, au ghana, ses huttes aux toits de chaume, sans eau ni électricité, prison au milieu de nulle part, refuge pour certains où sana siblzm a passé vingt ans pour sorcellerie. les yoruba et le pouvoir d’esu, dieu de la ruse. maya, chez les hausa, l’homme mangeur d’âme capable de posséder la tienne. dans le silence trop paisible de la cave à vin sicilienne, v se catapulte au nord-kivu, avec cette fille censée être une sorcière, ses cercles mélaniques en guise de cernes, son regard tourmenté par un trouble psychique sur lequel il n'est pas parvenu à mettre un nom. enfin, il a sa description, elle la lui murmure en la voulant énigmatique, à décrypter. — sauf changement, je pars en iran après le jeu, esquisse-t-il dans un sourire à l’attention du maître des cartes. penché sur le fou, il tapote de l’index le clébard blanc qui fait le beau à ses côtés. — je le connais, lui. il m’a suivi partout à gaza, jappant comme un con à chaque fois que virgil l’appelait, chopant ses laçets entre ses petits crocs, son poil trop clair pour la poussière de gaza toujours bruni. — je crois pas pouvoir me perdre, en effet. je peux te le faire ? lui retourner une carte, la mettre face à un dessin censé la représenter, lui montrer des chemins, les ébauches des signes qu’elle a toujours cherché à entrevoir sans jamais les trouver.

@virgil accroche sur l’astérisque qu’elle a laissé comprendre lorsqu’il est question de l’art divinatoire. Elle aurait dû s’en douter et en faire abstraction, mais elle mettra la faute sur un moment d'inattention dans ses explications. - Je ne vais pas tout te dévoiler après seulement quelques minutes. T’as peut-être des beaux yeux qui charment la galerie, mais la divination, c’est plus complexe qu’un cours du professeur Trelawney. Lui souffle-t-elle dans toute sa décontraction, cachant plutôt bien l'amusement que lui a procuré cette petite pique. De la psychanalyse? - Je dirais plutôt de l’exploration spirituelle. Le tarot offrait la possibilité de prendre ou de rejeter. D’analyser ou de survoler. Rien n’était fixé dans le béton. Les pistes de solution se trouvaient dans ce qu’on décidait de conserver et de travailler. - Je ne suis pas là pour donner des diagnostiques. La thérapie, elle connaissait. Et il n’y avait pas de magie dans ce qu’on décidait d'imposer comme étiquette malgré toute la validité des faits. Sa concentration sur le jeu qui se dessine avant même de retourner la première carte, elle laisse l’image du fou s’imposer entre eux. La nez en l’air avec toute sa liberté déployée, sans destination fixe. Les pieds sur le bord du néant, avec tout le potentiel de ce que représente le vide. Il n’y a aucune surprise sur les traits de Remi face à la carte zéro, l’arcane du début comme de la fin. Elle écoute Virgil survoler sa signification, avec la mention du prochain arrêt sur son itinéraire qu’elle devine infini. - Une forme d’aventure après une autre. commente-t-elle avec douceur tout en restant à l’écoute, ses lèvres qui s’étirent face à ce chien qu’il mentionne, la preuve que tout le monde peut trouver des signes et des images face à ce qui les interpellent sous forme de souvenirs ou de visions. -Tu le voyais comme un compagnon ou tu crois qu’il essayait de te prévenir d’un certain danger? elle questionne alors qu’elle vient lui voler la coupe qu’elle lui a servi pour y tremper ses lèvres à son tour. - Tu sais, je ne parlais pas nécessairement de destination concrète… Le fou cherche à se départager des identités qui lui sont données et imposées. C’est le signe de la recherche, des possibilités, de la spontanéité, du chaos… Ce qui peut amener une perte de connexion avec son instinct… une déresponsabilisation aussi, entre autres. Est-ce qu’elle le bombarde? Pas de son point de vue. Remi tente de bien imager la représentation de la carte, avec l’honnêteté qu’elle prête au tarot. Elle ne connaît pas Virgil. Mais elle ressent. Et dans toute son insouciance, elle capte aussi la souffrance. Il veut inverser les rôles, ce qui a le don de lui faire lever les sourcils d’étonnement. - Habituellement, une tarologue ne laisse pas une autre personne tirer les cartes avec son jeu… mais bon, il est presque deux heures du matin et ils sont dans une télé-réalité. - Allez, why not. elle laisse sa curiosité l’emporter, toujours prête pour expérimenter. Elle le guide dans les gestes à suivre, lui faisant brasser les cartes, ne pouvant s’empêcher de venir frôler possessivement celles-ci, incapable de briser la connection.

soit c'est ce monde, soit c'est moi. la facilité avec laquelle les professionnels de la psychiatrie placent les troubles dans des cases emmurées a eu raison de lui. écoeuré qu’on puisse s’affirmer aussi tranché sur un domaine dont on connaît si peu, il avait fini par se détourner de l'entreprise psychanalytique : si on devait lui montrer des tâches d’encre et lui demander ce qu’il y voit, nul doute qu’il finirait enfermé. huit millions d'façons d'voir le destin, p't-être toujours, p't-être jamais sain, j'suis pas médecin, rien d'autre qu'un amas de chair rempli de lumière jeté dans l'atmosphère. les pupilles de la sorcière, leur teinte cerise dans la lueur ambrée du feu, décomposent sa lumière au-delà des couleurs primaires. sa pudeur pleine de mystère retient sur elle le voile que les doigts de v sont venus attraper pour en soulever un pan. pas moyen. — c'est pas complexe les cours du prof trelawney ? il demande l'air de rien ; pour ce qu'il s'en souvient... l'exploration spirituelle plutôt que l'analyse freudienne, il signe le pacte de l'âme à l'âme, leurs lèvres partageant la même coupe de vin autour d'un savoir hasardeux, contingent comme il l'aime. la nouvelle métaphysique, celle qui rend les mathématiques sexy. le clébard palestinien sur la carte de remi lui revient en mémoire et, soudain interrogé à son sujet, il se prend à le regarder de nouveau sprinter autour d'eux, avec naïm. — je pensais qu'il avait juste la dalle de nos barres protéinées mais maintenant que tu le dis, il nous disait peut-être de nous tirer d'ici asap, et il avait ô combien raison. ça y est, après deux-trois gorgées de pinard gorgé de soleil sicilien, la prêtresse accepte enfin de lui détailler le bout de carton cryptique qui leur fait face. il l'écoute en posant les yeux sur sa mine enlunée, la surface lactescente de sa peau accompagnant ses mots en les nimbant d'une étrange pesanteur magique. j'sais qu'cette existence s'ra intense jusqu'au dernier quart, la voyante sursaute chaque fois qu'elle retourne une de mes cartes. juste une vie pour apprendre à vivre, comment tu veux faire ? j'sais même pas où je vais, je fais que suivre les feux verts. spontanéité, possibilités, monde ouvert sur l'immensité qu'il embrasse à pleine bouche. il vibre au son du chaos qu'elle fait résonner entre eux, sourit à l'entente du prénom de ce vieil ami qui partage sa route depuis les premiers instants, le guide parfois, l'étreint souvent. — tu crois que j'suis en perte de connexion avec mon instinct ? il a la vanne aux yeux mais la question est vraie, il est prêt à tout accepter, chaque perte, chaque dé-, c'est pas lui qui lance les dés mais c'est bien lui qui tire une carte après qu'elle a hésité d'une moue inquiétée par l'avancement du chaos personnifié jusque dans ses retranchements de papier cartonné. la sorcière l'invite à l'imiter, ses mains expertes guident ses mouvements lors du mélange, le vin a peut-être tourné dans la manoeuvre et ils ont rien vu venir tandis que leurs yeux s'échangent des paroles invisibles entre deux coups d'oeil aux cartes. il retire la main qu'elle suspend au-dessus d'elles façon mère couveuse. — lâche prise un peu, balance l'impulsif tout en laissant ses doigts à lui soupeser le dessus des cartes comme s'il pouvait en tâter le pouvoir inconsistant. — t'es dans mon équipage. t'as rien à craindre, il ajoute dans un sourire de pirate. c'est le fou qu'il retourne, son baluchon sur l'épaule, son bâton de marche au bras, le cul à l'air poussé par le même chien qui le poursuit ou l'avertit. sa tête est levée vers le ciel comme s'il se repérait aux planètes, de toute évidence le pèlerin n'a aucune idée d'où il se rend, mais il s'y rend. — j'crois qu'on va naviguer ensemble en eaux troubles, @remi. le one piece existe. cap sur laugh tale, mon fidèle compagnon. maintenant qu'il sait, les cheveux de remi ressemblent aux plumes d'un gris du gabon. que des mauvais choix mais j'suis au bon endroit.

- Mon très cher… Le Seigneur des Ténèbres s’éveille… Je vois dans votre avenir proche… une mort terrible... ouff… elle murmure de mystère et d’exclamation, sa voix rauque pour lui faire sa meilleure imitation du professeur Trelawney. C’est limite une insulte à son art, mais comme Rems est 30% sérieuse, 70% bullshit, elle trouve bien une façon de se moquer de la situation. - La prochaine fois, fais-moi moi penser d’apporter ma boule de cristal. elle finit par conclure sur la nouvelle connerie qui sort de sa bouche pour finalement retrouver son sérieux, l’ombre de ses iris qui prédomine sur la lueur des flammes qui l’entourent. L’exploration spirituelle, comme elle aimait le formuler, relevait d’une grande importance dans toutes les sphères de sa vie. Le partager, avec qui veut bien s’ouvrir, est perçu comme un privilège à ses yeux. Le pouvoir de briser le mur qui se dresse entre l’inconnu et elle. Cette sensation d’être en communion avec les cartes, la nuit lui portant conseil. Elle pourrait presque remercier @Virgil de s’être pointé à l’improviste avec le fou comme companion interne, pleines d’aventures et de possibilités. Le chien retire l’attention en premier lieu, Remi qui émet des hypothèses sur sa signification à la recherche d’une réaction, d’un souvenir dans les yeux de Virgil. - Les animaux ont une grande sensibilité émotionnelle qu’il serait idiot de ne pas reconnaitre. Elle y voit un signe, évidemment, mais elle va éviter de le relever encore et encore, puisqu’elle croit avoir fait le tour du sujet. Le plus important dans l’histoire, c’est le fou. Avec son baluchon rempli de mystère et d’ambition. Pour la sorcière, le fou est un point central des cartes. Il représente un tout et un rien du tout. Le vide comme le plein. - Certains disent qu’on pourrait comparer le fou à celui qui a un syndrôme de Peter Pan. Toujours un peu enfant, jamais vraiment adulte. Un définition parmi tant d’autres qu’elle laissait planer au-dessus de leurs têtes, surement en attention d’une réaction ou d’une négation. Est-ce qu’elle croit qu’il est en perte avec son instinct? - Bonne question. Qu’est-ce que tu en penses? elle est un guide ici. Le miroir qu’elle lui reflète, c’est pour l’aider à chercher en lui ce qui pourrait s’apparenter à ses définitions et questionnements. Elle voit bien que sa brusque quelque chose, même si l’égo surf sur la légèreté de ce qu’elle avance. Une nouvelle gorgée de vin avant de lui tendre la coupe, elle accepte de délaisser son pouvoir quoi qu’un peu à reculons devant l’exercice. Remi n’a pas de problème avec le fait de se faire tirer les cartes par quelqu’un d’autre. Mais un amateur, il fallait l’avouer, la froissait un peu plus. Sa façon de lui dire de lâcher prise la saisit, comme si elle prenait conscience de sa possession maladive qu’elle lui dévoilait à contre-cœur. - T’es autoritaire, elle lui indique sans réellement être un reproche. - Je suis possessive. Pas de tout. Que parfois. Elle met la main à nouveau sur le vin pour s’occuper, alors qu’il y a le fou qui se mêle à nouveau de la partie. L’ironie, tout de même, ça lui arrache un rire. - On est dans la merde, il y a le vertige qui nous attend au bout de la falaise, l'iceberg prêt à couler le Titanic, elle ajoute d’une métaphore qu’elle trouve très imagée. - Tout ce que je t’ai dit s'applique à moi aussi… Mais je te laisse y aller de ton interprétation, comme c’est toi le meneur ici. s'il voulait y ajouter ses intonations, elle était ouverte à tout.

les yeux de la sorcière s’agrandissent à mesure que sa voix prend des intonations de mystère grandiloquent, le visage de virgil ressemble soudain à celui qu’il avait à cinq ans, fasciné et ravi, son sourire s’étire en même temps que les mots qu’elle prononce, enchanté de l’imitation. la perspective de la mort n’a rien d’une menace, c’est bien une prédiction – la même que d’hab, qui se réalise tout le temps où qu’il passe pour prendre la température d’un conflit. futur comme avenir, la lutte pour la survie et le pouvoir choque les dommages collatéraux aux yeux blanchis par le départ, les charognards au-dessus de leurs pupilles abandonnées par l’âme. dans tous les pays, chacun y va de son explication, chacun a son chagrin et sa résignation. — toutes les voyantes passent leur temps à me plaindre d’en avoir trop vu, il chante dans son sourire, se remémorant ces fois où des femmes, toujours des femmes, lui ont proposé de lire en lui ; mains et lignes, marc de café, traits du visage, cartes à tirer, et même dans le fond des pupilles, parfois au simple toucher, un bras au-dessus de son torse ou sur son dos. — tu lis pas dans les feuilles de thé ? les entrailles de saturnin ? elle le briefe sur les animaux et leur sensibilité, il acquiesce d’un battement de cils, même si lui, ce sont les humains qui l’intéressent le plus, les humains et leur sensibilité bazardée, éclatée, nouée. il écoute ce que @remi lui dit du fou, dans l’entre-deux âges, plus un enfant mais pas encore un homme, éternel indécis quant à se positionner dans la maturité, le vécu en constante oscillation. ça lui parle, il le lui montre et sa question le prend de court. il pensait qu’elle lui dirait ce qu’il a besoin de savoir, pas qu’elle lui demanderait de le trouver. — mon instinct se calme un peu quand je suis pas en mission. mais je fais toujours uniquement ce que j’ai envie de faire, sans passer trop de temps à consulter ma raison. je crois pas avoir perdu ça, ou être sur le point de le perdre. il récupère la coupe de vin qu’ils sifflent à deux vitesse grand v, la termine et la remplit de nouveau pendant qu’elle l’informe d’un trait de caractère qui lui arrache une moue amusée. possessive, la grande prêtresse. — c’est pas les cartes que tu possèdes, c’est le moyen de les lire, note-t-il en lui jetant un regard avisé, s’enquérant de sa réaction. elle voit le vertige au bout de la falaise, le vide du grand dehors, le drame ultime qui le fait rire. si elle est le fou qui fronce les sourcils, il est son second visage, celui au rire insolent face au danger. — tu sais nager ? le vert de ses yeux s’illumine d’un éclat puéril quand il l’observe par-dessus les bougies, lui tendant la coupe pleine dans laquelle il vient de tremper ses lèvres. — lui, c’est le sage, dit-il en pointant le chien de l’index. — les cyniques disaient que le sage agit comme un chien, avec beaucoup de morale. le sage tente d’avertir le fou qu’il marche droit sur le vide, ce connard, sa rose à la main il capte pas qu’il va tomber de la falaise et ça fait japper le sage parce que ça n’a aucun sens de se tuer aussi connement. mais lui, c’est pas le fou pour rien, il ajoute en désignant le boug en robe orange et verte. — il suit sa propre logique. s’il regarde même pas sa route, les yeux levés vers le ciel, c’est pas parce qu’il est con, c’est parce qu’il voit pas pourquoi ne pas regarder la route ça voudrait dire qu’il va tomber. la vieille logique nous enseigne que tous les mecs qui ont marché dans le vide sont tombés, parce que les lois de la nature l'ont prouvé. mais le fou croit en la contingence de toute chose : c’est pas parce que tous les mecs qui ont marché dans le vide sont tombés depuis toujours que ça veut forcément dire qu’on tombera toujours en marchant dans le vide. tout peut être autrement que ce qu’il est. le fou apprivoise le chaos que ce vieux clébard peut même pas concevoir. son baluchon symbolise le voyage métaphysique. sa tête levée voit plus loin que les lois de la nature tracées dans le sol déjà foulé par des milliards de pieds. la rose blanche qu’il tient, ça me rappelle le nom de ce groupe de résistants allemands à l’époque du troisième reich, des étudiants qui avaient fondé un groupe pour résister aux nazis. ça veut dire que le fou résiste aux doctrines, aux discours manipulateurs, et aussi à tout ce que te fait faire la peur. conclusion, toi et moi on prend la mer sans vertige, sans peur de couler, et le gouvernement mondial nous arrêtera jamais. il a bon ou quoi ?