Le regard rivé sur le plafond de la chambre, l'insomnie l'assaille crescendo. Ça turbine sec là haut, l'esprit accaparé par des pensées envahissantes. Elle se retourne et fixe longuement le dos de Franz. Ils ne peuvent plus se parler, ordre du Proprio. Depuis, les soirées s'étirent plus lentement puisque c'était leur rituel de coucher. Se parler de leur journée, de leurs petits tracas, coincés dans leur bulle. Elle soupire, exaspérée par la situation, s'extirpe des draps et se chausse pour prendre l'air. C'est capuche sur la tête, airpods aux oreilles qu'elle se réfugie dans les jardins. Pas un chat à l'horizon. Elle se débarrasse de ses pompes, s'allonge à même l'herbe et scrute la voûte étoilée. Vénus est en beauté, ce soir, d'une brillance éclatante. Elle écoute des enregistrements d'elle, parlant à des inconnus des quatre coins du globe, des entrevues improvisées pour la plupart. Elle entend les rires, les pleurs, les déclarations enflammées et ça lui réchauffe le coeur. Elle est sur le point de fermer les yeux quand le bruissement des herbes l'interpelle. Elle se redresse lentement et voit @Franz debout à côté d'elle. Elle lui balance un smile dont elle a le secret, l'invitant à la rejoindre. Une fois l'allemand assis, elle lui attrape la main, la retourne et y dessine de son index une première lettre, puis la deuxième et ainsi de suite. Les lettres s'assemblent petit à petit pour former un Ça va ? au creux de sa chair. Le seul moyen possible de communiquer entre eux sans qu'un seul son ne puisse s'échapper de leurs bouches. Plutôt sommaire, mais efficace quand il s'agit de l'essentiel.

@Pessa

Il ne lui dirait pas, mais cette semaine, il la détestait au plus au point. Lui qui n'était pas habitué à regretter quoi que ce soit, voilà qu'il repensait à son choix du prime constamment, se disant que cette fois-ci, peut-être qu'il aurait du être égoïste plutôt que de vouloir aider son équipe. Et pourtant, la victoire, c'était ça qu'il voulait depuis le départ, alors pourquoi est-ce qu'il commençait à se soucier de ses interactions avec les autres ? Il le savait Franz, il se connaissait ; dès lors qu'il remettrait un pied à l'extérieur, il cesserait tous contacts avec les gens croisés ici. Il ne voyait pas comment ça pouvait être autrement, puisqu'ils vivaient tous au quatre coins du globe. Alors pourquoi est-ce qu'il tenait tant à ces conversations du soir ? Se retournant dans le lit, il le remarquait vide, draps tirés alors que la porte claquait bientôt avec douceur. Enfilant un simple short, il la suivait de loin, son instinct reprenant le dessus alors qu'ils se retrouvaient bientôt tous les deux dans le jardin. Regard capté, sourire, et puis une simple question au creux de sa paume. Mais il était nul pour ça Franz, et puis, il la détestait cette question. "Ça va ?" comme si quelqu'un était capable de répondre autre chose que "Oui". Ils le savaient tous, c'était presque tradition de répondre "oui" en enfilant son masque. Alors, sans répondre, il se contentait de glisser derrière elle, entourant son corps de ses jambes, dos contre le torse dénudé de l'allemand, ses bras s'enroulant autour de la taille de Pessa, doux baiser sur son épaule droite. Il en récupérait un de ses écouteurs, le glissant au creux de sa propre oreille. Des mots, des bruits de fonds. Sourcil arqué, il tentait de comprendre ce que c'était, comme s'il faisait face à une autre vie. Finalement, un simple "?" dessiné sur la peau de la brune, conscient qu'elle ne pourrait pas lui répondre, mais avide d'en savoir plus.